Lettre "S"
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SAEPE PREMENTE DEO, FERT DEUS ALTER OPEM
Si quelque Dieu nous presse, un autre nous délivre.
Vers d'Ovide. Les dieux du paganisme n'étaient pas toujours d'accord entre eux, et la discorde était quelquefois dans l'Olympe comme au camp d'Agramant. De dieu à dieu, de déesse à déesse, il y avait les petites rivalités, les petites haines, dont les pauvres humains subissaient le contrecoup. Avoir encouru la colère d'une divinité devenait souvent un titre à la protection d'une autre. Les Troyens avaient contre eux Junon et Pallas, mais Vénus combattait.dans leurs rangs.
- Tout de bon, mon père, votre doctrine est bien commode, et je vois bien maintenant à quoi vous servent les opinions contraires que vos docteurs ont sur chaque matière. Car l'une vous sert toujours et l'autre ne vous nuit jamais. Si vous ne trouvez votre compte d'un côté, vous vous jetez de l'autre, et tojours en sûreté.
- Cela est vrai, dit-il, et ainsi nous pouvons toujours dire avec Diana, qui trouva le père Beauny pour lui, lorsque le père Lugo lui était contraire : Saepe premente Deo, fert Deus alter opem.
PASCAL
Les Provinciales
Grimm assure que l'empereur est des nôtres ; cela est heureux, car la duchesse de Parme, sa soeur, est contre nous : Saepe premente Deo, fert Deus alter opem.
VOLTAIRE
A d'Alembert
Je vous prie de presser la publication de la lettre du petit bourgmestre. Embellissez, enflez cela. Le canevas doit plaire à ce pays-ci. Il est bon d'avoir les bourgmestres pour soi, si l'on a les jésuites contre  : Saepe premente Deo, fert Deus alter opem.
VOLTAIRE
A M. le marquis d'Argens
Mon cher ami, j'ignore si madame Denis vous a donné un chiffon de lettre que je vous écrivis étant un peu attristé et très malade. J'ai été en France depuis, à petits pas, m'arrêtant partout où je trouvais bon gîte, et surtout chez l'électeur palatin. Vous me direz que je dois être rassasié d'électeurs, mais celui-là est très consolant : Saepe premente Deo, fert Deus alter opem.
VOLTAIRE
Lettre à M. le comte d'Argental

SANCTUM SANCTORUM
Le saint des saints.
Nom donné le plus souvent par plaisanterie, à tout endroit retiré, à tout sanctuaire fermé aux profanes.
Des casiers de bois noir remplis de cartons étiquetés, quelques chaises de merisier recouvertes de velours d'Utrecht jaune, une pendule d'acajou, un carrelage humide, glacial, un plafond sillonné de crevasses et orné de guirlandes de toiles d'araignée, tel était le sanctum sanctorum du notaire.
E. SUE
Les Mystères de Paris
C'est ce qu'on appelle le petit hôtel du ministère, le sanctum sanctorum où notre homme d'État se retire loin du bruit et des profanes.
E. SUE
Le séchoir ! ce pandémonium de la tuliperie, ce tabernacle, ce sanctum sanctorum était, comme Delphes jadis, interdit aux profanes.
A. DUMAS
La Tulipe noire
- Venez, que je vous montre mon sanctum sanctorum, ma cellule, puis-je dire ; car, excepté deux fainéantes de la gent femelle qui, sous un sot prétexte de parenté, se sont établies dans mon logis, je vis ici en cénobite tout aussi bien que mon prédécesseur John de Geruell.
Walter SCOTT
L'Antiquaire

SCRIBITUR AD NARRANDUM, NON AD PROBANDUM
On écrit l'histoire pour raconter, non pour prouver.
Quand M. de Barante écrivit l'Histoire des ducs de Bourgogne, extraite en grande partie des chroniques contemporaines, il la présenta toute en narrations, d'après le précepte de Quintilien, pris à la lettre : Scribitur ad narrandum, non ad probandum. A la même époque, M. Daru fit paraître son Histoire de Venise, où, tout en fondant son récit sur les documents historiques, il en discutait la valeur, selon la méthode philosophique. De longues discussions s'engagèrent sur les deux méthodes ; on finit par s'en rapporter à la décision de Pline le jeune : « Historia quoquo modo scripta, delectat ; quelle que soit la manière dont l'histoire est écrite, elle charme. »
Selon nous, le plus sûr moyen de beaucoup prouver est de bien raconter, et la meilleure histoire narrative sera en même temps, sans nul doute, la meilleure histoire philosophique. Je ne sais donc ce que signifie la célèbre phrase de Quintilien, que M. de Barante a prise pour épigraphe de son ouvrage : Scribitur ad narrandum, non ad probandum. Si elle a un sens, il ne s'applique qu'à la manière des anciens chroniqueurs qui, devisant naïvement sur ce qu'ils ont vu et entendu, se reprennent, se contredisent, avec une bonhomie parfaite et qui nous enchante parce qu'elle leur est propre et naturelle.
Revue de Paris
M. de Barante adopta hardiment comme un système ce qui n'était que le vice d'un genre, et écrivit en tête de ses Ducs de Bourgogne le fameux paradoxe : Scribitur ad narrandum, non ad probandum. C'était tout simplement changer les rôles et passer à l'historien la plume du romancier.
Émile SOUVESTRE
Les Anciens écrivaient l'histoire pour raconter, non pour prouver : Scribitur ad narrandum, non ad probandum. Ils faisaient des poèmes en prose, d'où il suit qu'on ne peut raisonnablement leur demander que ce qu'on demande à la poésie, et qu'il ne faut guère chercher chez eux la vérité historique.
Gatien ARNOULD
Les tragédies de Voltaire offriraient plus d'intérêt, s'il eû mieux observé cette règle de la composition dramatique. C'est surtout à propos des ouvrages de théâtre que l'on peut dire avec Quintilien : Scribitum ad narrandum, non ad probandum.
Francis WEY

SEDET, AETERNUMQUE SEDEBIT INFELIX THESEUS
Là est et sera éternellement assis le malheureux Thésée (VIRGILE, Énéide, liv. VI, v. 617).
Selon la tradition mythologique, les héros vertueux goûtaient chez les morts les plaisirs qu'ils avaient recherchés sur la terre ; par la même raison, les coupables se voyaient frappés de châtiments qui faisaient un contraste pénible avec leur vie passée. C'est ainsi que, pour expier l'offense faite à Pluton (Thésée avait aidé Pirithoüs quand celui-ci tenta d'enlever Proserpine), Thésée, qui avait été sans cesse errant et voyageur, fut condamné dans les Enfers à rester éternellement assis.
Le mari travaille, il vend son temps et sa vie ; il arrive le matin à son bureau, et il y reste jusqu'au soir ; il subit le supplice que le poète latin inflige à un damné de l'Enter païen : Sedet, aeternumque sedebit infelix...
A. KARR
Les païens eux-mêmes ont cru à l'éternité de la vindicte divine dans le monde futur, et Virgile a été l'interprète de la croyance commune dans ce vers fameux : Sedet Theseus aeternumque sedebit.
LACORDAIRE

SEMPER AD EVENTUM FESTINAT
Il se hâte toujours vers le dénouement.
Ce conseil d'Horace (Art poétique, v. 148) s'adresse à tous ceux qui écrivent, mais surtout à celui qui raconte ; il doit aller toujours au fait par le chemin le plus court, et ne pas faire dire tout bas à ceux qui l'écoutent : « Avocat, passons au déluge. » Qu'on n'aille pas cependant se faire une fausse idée de la brièveté ; elle ne consiste pas précisément à s'exprimer en peu de mots, mais à ne rien dire d'inutile. Un récit de deux pages est court s'il ne contient que ce qui est strictement nécessaire, tandis qu'un récit de vingt lignes est long s'il peut être renfermé en dix.
Il ne s'égare point en de trop longs détours ;
Sans garder dans ses vers un ordre méthodique,
Son sujet de soi-même et s'arrange et s'explique ;
Tout, sans faire d'apprêts, s'y prépare aisément ;
Chaque vers, chaque mot court à l'événement.
BOILEAU
Art poétique
Dans la tragédie de Lucrèce, l'exigence des cinq actes, coupe sacramentelle qui ne se prête pas à tous les sujets, lit de Procuste de la tragédie classique, a amené M. Ponsard à oublier le sage précepte d'Horace : Semper ad eventum festinat, et à prolonger démesurément une situation toujours la même à dater du troisième acte.
DE PONTMARTIN
Ni le talent de Talma, ni celui de mademoiselle Mars ne purent obtenir grâce, en cette occasion, devant le rigorisme du parterre. Le parterre trouva qu'une telle scène était un hors-d'oeuvre, qu'elle entravait la rapidité de l'action, en un mot, qu'elle violait ouvertement la règle semper ad eventum festinat ; il fut inexorable.
SAINTE-BEUVE
Corneille manque dans Horace à la grande règle semper ad eventum festinat ; mais quel homme l'a toujours observée ?
VOLTAIRE
Commentaire sur Corneille
Il y a dans ces vers des détails charmants ; mais ce charme même est une distraction qui nuit au sentiment que le poète veut exprimer. La règle d'Horace, semper ad eventum festinatSAINT-MARC GIRARDIN

SERVUM PECUS
Troupeau servile.
« O imitatores, servum pecus, a dit Horace, ô imitateurs, troupeau servile ! » imiter les grands modèles sans les copier, se remplir de leurs sentiments et de leurs pensées, de leurs expressions et de leurs tours, en disposer comme de son propre bien, sans gêne et sans contrainte, fut toujours le privilèges exclusif de quelques écrivains de génie.
Molière disait : « Je prends mon bien partout où je le trouve. » Il imitait donc, mais il surpassait, mais il changeait le cuivre en or, fidèle au précepte : Il est permis de volier un auteur, pourvu qu'on le tue.
Comment se fait-il que l'homme, dont la pensée s'élance jusque dans les cieux ; l'homme, la plus belle, la plus excellente et la plus noble des créatures, le miracle de la nature, comme l'appelle Zoroastre ; le miroir de la présence divine, selon saint Chrysostome ; l'image de Dieu, suivant Moïse ; le rayon de la divinité, comme dit Platon ; la merveille des merveilles, suivant Aristote ; comment se fait-il que l'homme se dégrade ainsi lui-même, en se vouant à une imitation servile ? O imitatores !...
STERNE
Avant 1789, quand il y avait en France une noblesse, on conçoit que la constitution anglaise pût s'établir en France sous la forme qu'elle a en Angleterre. Mais en 1814 !... Et, plus tard, en 1830 !... O imitatores, servum pecus !
Pierre LEROUX
De la Ploutocratie
Il est membre de l'Institut, donc il enseigneit dans nos écoles publiques ce qu'il n'a jamais su, donc les ministres vont lui confier des charges qu'il est incapable de remplir, etc., etc. Voilà le mal, et nos gouvernants devraient au moins distinguer le poussier du bon grain, et les talents réels, du servum pecus, de la bande moutonne, qu'un jury complaisant a fait agréger.
CASTIL-BLAZE

SESQUIPEDALIA VERBA
Mots longs d'une toise (HORACE, Art poétique, v. 97).
« Le héros de la tragédie ne doit employer, s'il veut que ses malheurs touchent le coeur du spectateur, ni paroles ampoulées, ni mots longs d'une toise. »
Il me fait dire aussi des mots longs d'une toise, de grands mots qui tiendraient d'ici jusqu'à Pontoise. C'est dans la bouche de Petit-Jean que Racine met cette expression d'Horace.
Il faut noter que pervers avait un pied et demi dans la bouche de Séraphine, c'était le verbum sesquipedale de mon Horace.
Ch. NODIER

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