Lettre "S"
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[SI->SIM]

SI AUGUR AUGUREM...
Si un augure voit un augure...
Le proverbe latin ajoute: « Il ne peut s'empêcher de rire. » C'est le vieux Caton qui a le premier lancé ce trait contre les augures, et Cicéron le répète dans son Traité de la Divination, liv. II, ch. XXIV : « C'est un mot depuis longtemps connu que celui de Caton, qui s'étonnait que deux augures pussent se regarder sans rire. »
Les augures étaient à Rome des ministres de la religion, qui se faisaient les interprètes de la volonté des dieux et qu'on ne manquait jamais de consulter pour savoir si une entreprise réussirait ou non. Les augures répondaient après avoir consulté le vol, le chant, l'appétit des oiseaux, les éclairs, la foudre, les entrailles des victimes, etc. Quand ils entraient en charge, ils juraient de ne jamais révéler aucun de leurs mystères, et ils avaient sans doute pour cela de bonnes raisons.

Avant même la fin de la république, les augures étaient tombés en discrédit. Il serait trop long de citer toutes les plaisanteries inspirées par leur science chimérique. Caton rencontre un de ses amis, l'air soucieux et troublé : « Qu'avez-vous, lui dit-il ? Un malheur vous est-il arrivé ? - O mon ami, je crains tout. Ce matin, en me réveillant, j'ai vu, le dirai-je ? une souris rongeant mon soulier ! - Eh bien, répondit Caton, tranquillisez-vous ; le prodige serait vraiment grand si le soulier avait rongé la souris. »

Annibal conseillait à Antiochus de livrer bataille aux Romains ; le roi lui ayant répondu qu'il ne l'osait, parce que les entrailles des victimes n'étaient pas favorable : « Quoi ! lui dit Annibal, aimez-vous mieux vous en rapporter aux entrailles d'un boeuf qu'à l'avis d'un vieux général ? »

Etait-on incapable d'entrer avec gloire dans la carrière des Corneille, des Racine, des Voltaire ? Y avait-on fait un faux pas ? On s'accrochait à la poésie lyrique, et l'on allait cacher sa nullité à I'opéra. On était fort, du moment où I'on était agréé par les grands faiseurs. On excellait dans un genre, on en avait la clef et le secret ; mais ce secret était celui des augures, qui, persuadés de la vanité de leur science, ne pouvaient se rencontrer sans rire, si augur augurem...
Revue de Paris

SIC ITUR AD ASTRA
C'est ainsi que l'on arrive aux cieux.
VOIR, pour l'explication, Macte animo.
Maître du Boulay, replié dans son ambition de renommée et d'importance, se disait à lui-même : « Je le tiens ! Je tiens mon grand procès ! Sic itur ad astra ! » Et vraiment son front touchait aux astres, et vraiment il tenait aux astres, et vraiment il tenait au moins une grande affaire ; car cette fois, il aura pour sa cliente, la royauté du roi Louis XIV.
Jules JANIN

SIC TE DIVA POTENS CYPRI !
Que la déesse qui règne à Chypre te protège ! (HORACE, liv. I, ode III)
Sic te Diva potens Cypri
Sic fratres Helenae, lucida sidera,
Ventorumque regat pater !

« Que la déesse qui règne à Chypre, et les frères d'Hélène (Castor et Pollux), astres brillants, et le Père des Vents te protègent ! »
Ces souhaits s'adressent au vaisseau qui emporte Virgile.
Vaisseau du peuple de Paris, qui portes dans tes flancs l'histoire de notre monarchie, que les vents te soient toujours favorables ! Sic te diva potens Cypri ventorumque regat pater !
Granier DE CASSAGNAC

SIC TRANSIT GLORIA MUNDI
Ainsi passe la gloire de ce monde.
Pensée tirée de l'imitation de Jésus-Christ ; c'est une variante du « Vanitas vanitatum, omnia vanitas, vanité des vanités, tout est vanité. »
Voyez-vous Necker dans la consternation ? Il n'a pas réussi, il est atterré, et depuis ce jour-là le grand homme n'a plus été qu'un pauvre homme : Sic transit gloria mundi.
X...
Alexandre Dumas publie les Mémoires de Garibaldi. Ayez donc couru avec éclat les aventures dans les quatre parties du monde, pour qu'un entrepreneur de romans s'empare de l'histoire de votre vie afin de la refaire à son gré et de la découper en feuilletons ! Sic transit gloria mundi.
Lucien DUVAL
Le princeT..., l'homme le plus riche de Rome, en est peut-être le plus malheureux. Sa famille a perdu en peu de temps un beau duché, un héritage important et une entreprise prodigieusement lucrative ; sa femme est folle, ses héritiers sont des filles, son frère est nul, un de ses neveux est idiot, et l'autre, qui méritait de vivre, ne vivra pas : Sic transit gloria mundi.
Edmond ABOUT
Rome contemporaine

SIC VOS NON VOBIS
Ainsi vous - travaillez - et ce n'est pas pour vous.
Voici l'origine de cette locution :
Auguste faisait célébrer à Rome des fêtes publiques qui furent interrompues par un orage ; mais, dès le lendemain, les jeux recommencèrent, et Virgile traça le distique suivant sur la porte du palais : Nocte pluit tota, redeunt spectacula mane : divisum imperium cum Jove Caesar habet.
« Il a plu toute la nuit, le matin recommencent les spectacles publics : Auguste partage avec Jupiter l'empire du monde. »
Auguste ayant voulu connaître celui à qui il devait ces vers flatteurs, Virgile ne se présenta pas, et un poète obscur, du nom de Bathylle, finit par s'en déclarer l'auteur. Il fut comblé d'éloges et largement récompensé. Piqué de voir un autre recevoir des honneurs qui lui étaient dus, bien qu'il ne les eût pas désirés, Virgile écrivit de nouveau les deux vers sur les murs du palais, et traça, au-dessous ceIui-ci :
Hos ego versiculos feci, tulit alter honores
(De ces deux petits vers, Romains, je suis l'auteur, et cependant un autre en reçoit tout l'honneur).
Il y ajouta le commencement de quatre autres vers, dont les premiers mots étaient Sic vos non vobis. Auguste exprima le désir de les voir achevés ; Bathylle essaya vainement, et Virgile les compléta de la manière suivante :
Sic vos non vobis nidificatis, aves ;
Sic vos non vobis fertis, oves ;
Sic vos non vobis mellificatis, apes ;
Sic vos non vobis fertis aratra, boves
.
Ainsi, mais non pour lui, l'agneau porte la laine ;
Ainsi, mais non pour lui, le boeuf creuse la plaine ;
L'oiseau bâtit son nid pour d'autres que pour lui,
Et le miel de l'abeille est formé pour autrui.
Constamment dépouillé, Sauvage put commencer cette fois l'exploitation de son réducteur, la seule de ses créations où lui avait été épargné le fatal sic vos non vobis, et qui est employé aujourd'hui par son fils à la reproduction des antiquités du Louvre.
Louis COMBES
C'est un mauvais calcul que de dérober, même en littérature. On sait ce qu'il en advint à Bathylle. Gare au sic vos non vobis ! On s'expose ainsi à des risques proportionnés à la valeur de l'objet dérobé, à une honte proportionnée à la gloire qu'on a usurpée.
ARNAULT
Machinalement j'ouvris le papier resté dans ma main ; une boucle de cheveux s'offrit à ma vue, une jolie boucle dorée, soyeuse, récemment coupée, et, selon toute apparence, destinée à l'auteur légitime du sonnet, qui l'attendait depuis près d'un mois. - Sic vos non vobis, dis-je, en me laissant tomber sur la banc, avec une hilarité d'écolier.
CH. DE BERNARD
Lorsque Mesmer, à Londres, apprit le succès de M. Deslon, son élève, il crut ne pas devoir se borner à dire : Sic vos non vobis... il repassa bientôt le détroit de Calais, accourut à Paris, et son premier souhait fut d'accuser d'infidélité et surtout d'ignorance un élève qui osait magnétiser pour son seul et privé compte.
GRIMM
Correspondance littéraire

SIMILIA SIMILIBUS CURANTUR
Les semblables se guérissent par les semblables.
Depuis longtemps on disait : Qui se ressemble s'assemble, et la vérité de ce proverbe tiré du latin similis simili gaudet (le semblable aime le semblable) est incontestable. On ne peut en dire autant de cette proposition mise en avant par une école dont l'existence n'est pas encore très ancienne : Similia similibus curantur. Tel est le drapeau de l'homéopathie.
Se mettre nu pour se garder du froid, se couvrir de fourrures contre la chaleur, se jeter au feu pour se guérir d'une brûlure, ce procédé de Gribouille, élevé à la hauteur d'une théorie, voilà le système des homéopathes. Un homme a la fièvre ; le remède est indiqué ; il faut lui administrer ce qui la lui donnerait s'il ne l'avait pas : Similia similibus.
L. REYNAUD
Jérôme Paturot
C'est l'homéopathie appliquée aux choses morales ; similia similibus. Supposez, par exemple, un homme emporté ; si l'on se contente de lui faire ressortir philosophiquement les inconvénients de sa colère, il ne sera que plus furieux et s'irritera contre le pacifique sermon qu'on lui fera subir ; mais si quelqu'un s'avise de lui tenir tête, criant quand il crie, brisant quand il brise, vous le verrez s'adoucir peu à peu, et au bout de quelques jours de ce régime, il deviendra doux comme un mouton.
Gustave CHADEUIL
Ces jours derniers, un chien enragé répandit la terreur dans une maison de la rue Saint-Honoré. Cet animal mordit d'abord, au premier étage, un rentier qui remontait ses pendules, et, au troisième, un employé qui fêtait la mort de son chef de bureau par un repas copieux. Ces deux victimes de l'hydrophobie ayant quitté leur appartement, entreprirent dans la maison une course désordonnée, au grand effroi des locataires, et, par un hasard providentiel, parvinrent à se rencontrer, se ruèrent l'un sur l'autre, se mordirent réciproquement, et, en vertu de l'axiome similia similibus curantur, furent immédiatement guéris.
Le Tintamarre
La vieille médecine s'appliquait à rechercher et à écarter les causes des maladies. Tolle causam (Détruisez la cause), s'écriait-elle ; et pour détruire les causes du mal, elle procédait d'après cet axiome : Contraria contrariis curantur (VOIR cette locution). D'après ce principe, plus meurtrier, plus funeste que les boulets ramés et les fusées à la Congrève, elle combattait les irritations par des calmants, et les inflammations par les saignées, raisonnant comme un homme qui, voyant sa maison brûler, s'aviserait de jeter de l'eau sur la flamme.
Nous autres, nous avons changé tout cela ; nous disons : Similia similibus ; nous irritons les irritations, nous enflammons les inflamamtions ; pour le guénir, nous doublons le mal, nous le poussons à bout, nous l'aiguillonnons, nous l'exaspérons.
Jules SANDEAU
Le Docteur Herbeau
Ces pauvres médecins de fantaisie, victimes de la méprise d'Hahnemann, auraient pu se voir traquer comme des bêtes fauves, au lieu de gagner cent mille francs de rente. Ils aimeraient mieux les cent mille francs de rente, et voici ce qu'ils ont imaginé. Ils ont écrit sur l'enseigne de leur boutique le célèbre similia similibus. C'est latin, c'est joli, c'est harmonieux, c'est nouveau et paradoxal.
E. ABOUT
Lettres d'un bon jeune homme
MADAME CHARLOT. C'est moi, madame; je viens pour le papier, vous savez...
SÉRAPHINE. Ma chère madame Charlot, vous voyez une femme au désespoir ; je ne me trouve pas en mesure de vous payer aujourd'hui. : je me vois donc dans l'obligation ou de vous renouveler mon billet...
MADAME CHARLOT. Passons à autre chose.
SÉRAPHINE. Ou de vous prier d'accepter en échange de ce que je vous dois les fournitures mêmes que vous m'avez faites.
MADAME CHARLOT. Similia similibus ! de l'homéopathie, c'est bon pour le corps, mais pas pour la poche... je n'en use pas.
Émile AUGIER
Les Lionnes pauvres

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