Lettre "F"
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FACIT INDIGNATIO VERSUM !
L'indignation fait jaillir le vers !
Juvénal (satire I, v. 79), brûlant d'écrire contre la corruption des moeurs de son temps, débute ainsi : Si natura negat, facit indignatio versum (Si la nature ne m'a pas fait poète, l'indignation fera jaillir le vers).

Boileau, dans sa première satire, a paraphrasé ainsi Juvénal :
Et quel homme si froid ne serait plein de bile
A l'aspect odieux des moeurs de cette ville ?
Qui pourrait les souffrir ? Et qui, pour les blâmer,
Malgré Muse et Phébus n'apprendrait à rimer ?
Non, non, sur ce sujet, pour rimer avec grâce,
il ne faut point monter au sommet du Parnasse ;
Et sans aller rêver dans le double vallon,
La colère suffit, et vaut un Apollon.

Le satirique latin exprime tout autant et plus fortement en un seul vers. Juvénal s'attaque à la corruption de son siècle, ce sont les mauvais poètes qui échauffent la bile de Boileau ; et les moeurs d'une Messaline inspirent une indignation plus forte que les méchants vers de Pradon. Régnier a aussi imité le poète latin : Et souvent la colère inspire de bons vers.

Un des discours en vers de Pompignan est tout entier contre la calomnie, et il se distingue des autres par la chaleur et la véhémence que l'auteur y répand. C'est, au total, sa propre cause qu'il défend et ses ennemis qu'il combat : Facit indignatio versum.
LA HARPE
Moi qui connais les privilèges du facit indignatio versum et qui ai étudié ma rhétorique, je ne suis pas tout à fait dupe de la mordante hyperbole, et je sais tout ce qu'il faut en rabattre.
L. PEISSE
La Médecine et les Médecins
On reconnut dans l'auteur des lambes un homme que la colère avait fait tout à coup poète, mais poète à la façon de Juvénal, poète vraiment grand, vraiment noble, vraiment indigné : Facit indignatio versum.
A. ASSELINE
M. le comte de Maistre, dans son sévère et remarquable portrait de Voltaire, observe qu'il est nul dans l'ode, et attribue avec raison cette nullité au défaut d'enthousiasme. Voltaire, en effet, qui ne se livrait à la poésie qu'avec antipathie, et seulement pour justifier sa prétention à l'universalité, Voltaire était étranger à toute profonde exaltation, il ne connaissait d'émotion véritable que celle de la colère, et encore cette colère n'allait-elle pas jusqu'à l'indignation, jusqu'à cette sainte indignation qui fait poète, comme dit Juvénal : Facit indignatio versum.
Victor HUGO
Mélanges littéraires

FAMA VOLAT
Le bruit, la renommée vole.
La Renommée, pour les Anciens, était une déesse au vol puissant, infatigable, et dont les cent bouches faisaient retentir autant de trompettes.
La Contemporaine fut surnommée d'un triste surnom : « la Renommée volante, fama volat », et nous ne pensions pas qu'à ce terrible passage de la Bérézina, le maréchal Ney eût montré tant d'esprit que cela.
Jules JANIN

FAR NIENTE
Ne rien faire.
Charme résultant d'une inaction absolue de corps et d'esprit. C'est surtout dans les climats chauds qu'on peut en sentir toute la douceur. Le Iazzarone de Naples est le plus parfait modèle du far niente. Les Orientaux ont le kief, qui ne diffère que par le nom du far niente des Italiens et des Espagnols.
Dans l'intimité du petit cercle d'amis auxquels son coeur sensible attachait tant de prix, le regard de Césarotti devenait étincelant, son geste aisé, et son esprit, malgré l'érudition qui le surchargeait, rapide et de feu. Quoiqu'il eût toujours à la bouche le dolce far niente, tant et si injustement reproché aux Italiens, il écrivait sans cesse.
Revue de Paris
Les quelques lignes qui suivent vous donneront une juste idée de cette volupté du far niente qu'avait Rivarol : « Paresseux à l'excès, Rivarol avait déjà passé le terme où son dictionnaire devait être achevé, qu'il n'avait pas encore fait un article du dictionnaire. »
Arsène HOUSSAYE
Madame de Sévigné aime à se promener aux rayons de la belle maitregse d'Endymion, à passer deux heures seule avec les Hamadryades ; les arbres sont décorés d'inscriptions et d'ingénieuses devises. « Bella cosa far niente (belle chose que le far niente), dit un de mes arbres ; l'autre lui répond : Amor odit inertes (l'amour hait les paresseux) ; on ne sait auquel entendre. »
SAINTE-BEUVE

FAVETE LINGUIS
Faites silence (HORACE, liv. III, ode I, vers 2).
On trouve dans le cinquième livre de l'Énéide : Ore favete omnes, mots qui ont le même sens : c'était la formule que prononçait le prêtre avant de commencer le sacrifice, pour commande, sinon un silence absolu, du moins l'abstention de toute parole profane.
Oyez, oyez ! Silence, enfants ; m'est avis que ce bélître va prêcher la passion. Un son de trompe avant le cri de ce héraut ! Favete linguis.
Bib. JACOB
Mes bons amis, favete linguis ; ne m'accablez pas de questions. Pour vous donner des détails, il faut d'abord, selon tous les principes de la logique, que je les connaisse moi-même.
Walter SCOTT
L'Antiquaire
- Maître Holyday, s'écria la femme du magister, maître Érasme Holyday, venez, venez vite, s'il vous plaît.
Favete linguis, répondit une voix partant de l'intérieur ; je ne puis y aller maintenant ; je suis dans le moment le plus intéressant de mes études du matin.
Walter SCOTT
Le Château de Kenilworth

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