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BEATI PAUPERES SPIRITU
Bienheureux les pauvres d'esprit.
Si l'on cherchait le sens de ces premières paroles du Sermon sur la montagne, dans l'application qui en est faite d'ordinaire, il faudrait admettre, comme on le fait généralement, que Jésus-Christ a glorifié l'idiotisme. Ce sens ne peut être celui de l'Écriture. Quelques interprètes ont traduit pauperes spiritu par pauvres en esprit, c'est-à-dire détachés de tous les biens terrestres et n'aspirant qu'aux biens du Ciel ; mais une tradition erronée est indestructible ; on a dit une fois et l'on dira toujours : Bienheureux les pauvres d'esprit, en appliquant cette expression à ceux qui, dépourvus d'instruction et de talents, voient cependant leurs affaires prospérer : Cet homme a fait une fortune colossale en quelques années, et c'est à peine s'il sait signer son nom : Beati pauperes spiritu.
Quoique le vicaire fût un de ceux auxquels le paradis doit un jour appartenir en vertu de l'arrêt Beati pauperes spiritu ! il ne pouvait pas, comme beaucoup de sots, supporter l'ennui que causent d'autres sots.
BALZAC
L'Univers préconise systématiquement l'ignorance. Hier encore il protestait contre les procès de la raison humaine. Il prend à la lettre le texte beati pauperes spiritu, et il a naguère crié de toutes ses forces : « Abêtissez-vous ! ». Il faut bien qu'il prêche d'exemple.
Émile DE LA BÉDOLLIERE

BEATUS ILLE QUI PROCUL NEGOTIIS...
Bienheureux ceux qui, loin des affaires... (Horace, Épodes, ode II, v. 1)
C'est le début de l'ode dans laquelle le poète chante les charmes de la campagne, qu'il oppose aux bruyantes occupations des villes :
Heureux qui, loin du monde, étranger aux affaires,
Cultive avec ses boeufs ses champs héréditaires,
Ainsi qu'au siècle d'or de nos premiers aïeux !

Nous retrouvons la même pensée dans Boileau :
Qu'heureux est le mortel qui, du monde ignoré, vit content de lui-même en un coin retiré !

Et dans Racine :
Heureux qui satisfait de son humble fortune...

Personne n'exige, aux Délices, que je fasse des visites ; on a pitié de ma mauvaise santé ; j'ai tout mon temps à moi ; je suis aussi heureux qu'on peut l'être quand on digère mal. En vérité, cela vaut bien le sort d'un secrétaire d'Etat qu'on renvoie : Beatus ille qui procul negotiis. La liberté, la tranquillité, l'abondance de tout, et madame Denis, voilà de quoi ne regretter que vous.
VOLTAIRE
Lettre à M. de Cideville

BELLAQUE MATRIBUS DETESTATA
La guerre détestée des mères.
Horace (livre I, ode I, v. 24) parle des différentes carrières qui se présentent aux hommes : « Beaucoup aiment les camps, le son du clairon mêlé au bruit de la trompette, la guerre détestée des mères »

On trouve un reflet de la pensée d'Horace dans ce beau vers de Barbier : Le bronze que jamais ne regardent les mères.

On lira quelques-unes des lettres que le comte de Maistre écrivait à son fils, dans ses absences aussi cruelles pour un père que pour une mère : Bellaque matribus detestata. Mais le comte de Maistre se soutenait en pensant que son fils faisait son devoir, et qu'il était à la place où l'appelaient l'honneur et la conscience.
Rodolphe de MAISTRE
Déjà, dans les temps. anciens, le vieil Hérodote avait dit que la paix est le temps où les fils enterrent les pères, et la guerre, le temps où les pères enterrent les fils. Ajoutez-y le bella matribus detestata d'Horace, et vous aurez ce qu'on peut dire de plus juste et de plus fort contre la guerre.
Eugène de MONGLAVE

BIS DAT QUI CITO DAT
Qui donne vite, donne deux fois.
Cette pensée de Sénèque a été exprimée dans toutes les langues : « Ne dites point à votre ami qui vous demande quelque chose : Allez et revenez, je vous le donnerai demain, lorsque vous pouvez le lui donner à l'heure même (Salomon).
Qui oblige promptement oblige doublement (Proverbe français)
Ne dites jamais : A demain,
Pour adoucir une blessure ;
Donnez aux pauvres du chemin,
Donnez sans compter : Dieu mesure.
H. CHEVREAU
Il y a de l'orgueil, pour ne pas dire plus, à faire attendre longtemps ce qu'on pourrait accorder tout de suite : Bis dat qui cito dat.
Revue de Paris

BIS REPETITA PLACENT
Les choses répétées, redemandées, plaisent (Horace, Art poét., v. 365).
Pour parler avec plus de détail de quelques peintres de portraits, il faudrait reprendre notre étude sur l'école de leurs maîtres ; mais le bis repetita placent n'est pas une devise à l'usage de toute espèce de critique.
Revue de Paris
Heureux les auteurs qui produisent de ces ouvrages dont Horace a dit : Decies repetita placebunt. Ils n'obtiendront cet avantage que par l'alliage, si difficile à préparer, de I'utile et de l'agréable.
Galerie de littérature
Les Harmonies sont une reprise malheureuse des Méditations. Versification lâche, incorrecte, pensée nulle. En poésie on ne se répète pas : Bis repetita non placent.
PROUDHON

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