Lettre "D"
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DOLUS AN VIRTUS QUIS IN HOSTE REQUIRAT ?
Ruse ou courage, qu'importe contre l'ennemi ? (VIRGILE, Énéide, liv. II, v. 390).
Un des derniers défenseurs de Troie, l'ardent Chorèbe a réuni autour de lui quelques compagnons ; ils font tomber sous leurs coups une troupe de Grecs qui dans l'obscurité les ont pris pour des alliés ; ce premier succès les encourage, et Chorèbe s'écrie : « Amis, changeons nos boucliers, que sur nos têtes flottent les panaches des Grecs. Ruse ou courage, qu'importe contre l'ennemi ! »
Si le pouvoir, pour échapper aux traits de votre brûlante critique, osait interdire la science même et suspendre la communication des idées, alors vous seriez dans le cas de légitime défense : Dolus an virtus quis in hoste requirat ?
PROUDHON
On jure, mais on reste le même dans le for intérieur, on garde les mêmes passions, les mêmes haines, enfin le serment devient la mise en pratique de cette maxime connue : Dolus an virtus quis in hoste requirat ?
Revue de Paris

DONEC ERIS FELIX, MULTOS NUMERABIS AMICOS
Tant que vous serez heureux, vous aurez beaucoup d'amis.
Ainsi parle Ovide exilé, et il ajoute : Tempora si fuerint nubila, solus eris (si le ciel se couvre de nuages, vous serez seul).
Le vieux poète Rutebeuf a dit avec finesse : Ce sont amis que vent emporte, et il ventait devant ma porte.

M. Ponsard en a donné aussi une heureuse traduction dans sa comédie l'Honneur et l'Argent : Heureux, vous trouverez des amitiés sans nombre, mais vous resterez seul si le temps devient sombre.

Cette idée de l'isolement qui se fait autour du malheureux a fourni au P. Félix une belle image. Après avoir parlé du reniement de saint Pierre, l'éloquent orateur compare Jésus-Christ, abandonné de tous, à un arbre dont le feuillage épais a longtemps servi d'asile à des milliers d'oiseaux ; le bûcheron arrive et au premier coup de hache, tout s'enfuit, l'arbre reste seul, solus eris.

Un ami, pour la plupart des hommes, est un complaisant qui les amuse, qui se prête à leurs goûts, à leurs caprices, qui partage habituellement leurs plaisirs, qui les admire, qui veut bien les aider à dissiper leur fortune. Faut-il être surpris de voir disparaître des amis de cette trempe dès que la fortune est disparue. Ovide a dit avec assez de raison : Donec eris felix multos numerabis amicos ; Tempora si fuerint nubila solus eris.
D'HOLBACH

DULCE ET DECORUM EST PRO PATRIA MORI
Il est doux, il est beau de mourir pour la patrie (HORACE, ode II, liv. III, vers 13).
Cette ode, adressée aux jeunes Romains, est mêlée d'un chant guerrier de Tyrtée dont il nous reste un fragment.
Lord X..., d'un âge très avancé, condamné à mort pour avoir pris part à l'insurrecilon de 1745, en Écosse, s'appuya sur le bras de deux gardes pour monter sur l'échafaud. Jetant un coup d'oeil autour de lui et voyant une foule immense, il dit en ricanant : « Dieu nous protège ! voilà bien du monde assemblé pour voir tomber la tête grise d'un vieillard qui ne peut monter trois marches sans être soutenu par deux bras ! » Sur l'échafaud, il répéta le vers d'Horace : Dulce et decorum est pro patria mori.
Walter SCOTT
Histoire d'Écosse
Marchons à ce palais où le tyran se livre à d'impures délices, entouré de ses féroces satellites ; réclamons nos libertés et périssons tous, s'il le faut ! Dulce et decorum est pro patria mori.
Alphonse KARR

DULCES MORIENS REMINISCITUR ARGOS
En mourant, il revoit en souvenir sa chère Argos (VIRGILE, Énéide, liv. X, v. 782).
Anthor, le compagnon d'Hercule, l'ami d'Évandre, avait suivi Énée en Italie. Dans un combat contre Mézence, l'infortuné Anthor reçoit un trait destiné au héros troyen. Sternitur infelix... et dulces moriens reminiscitur Argos. « Il tombe et, mourant, il revoit en souvenir sa chère Argos », c'est-à-dire la patrie, le foyer paternel.
Si le pathétique est ce qui émeut le coeur et dispose à répandre des larmes, qu'y a-t-il de plus touchant que le tableau de ce jeune guerrier qui se rappelle en mourant sa douce patrie et jette vers elle un dernier regard !
Adieu, mon cher ange, dites bien à madame Denis combien elle est adorable ; j'ai été tenté de partir sur la jument Borak de Mahomet pour venir l'embrasser, mais je n'ai pas assez de santé pour voyager à présent ; je suis tout malingre, et dulces moriens reminiscitur Argos. Adieu, mes respects aux anges ; vous êtes mon Argos.
VOLTAIRE
Lettres
Si tu m'aimais, Phoedine, il fallait me pleurer
Quand d'un titre funeste on me vint honorer,
Et lorsque m'arrachant du doux sein de la Grèce,
Dans ce climat barbare on traîna ta maîtresse !

Ce retour vers son heureuse patrie, si naturel dans un pareil moment, rappelle le dulces moriens reminiscitur Argos et l'Histoire malheureuse de ma gloire. Que de beautés !

LA HARPE
Commentaires sur Racine
Cet animal nous toucha : nous lui trouvâmes l'air mélancolique et consterné des nouveaux détenus à leur entrée dans la prison. C'était triste à voir comme cette lionne pleurait et comme elle semblait regretter le sable absent de sa douce patrie, dulces reminiscitur Argos.
A. ESQUIROS
Visite au Jardin des Plantes
« Si je connais Gaffi, disait Vidocq ; j'ai vu de ses cheveux !... » Il savait sur le bout de son doigt toute son histoire de la rue de Jérusalem...Reminiscitur Argos.
J. JANIN
Avant que le feu et la magie de votre pinceau eussent animé cette scène de carnage, déjà, par le seul secours de votre crayon, j'avais vu la fougue des coursiers, le désordre des lances, le mouvement des bataillons, la terreur des fuyards et l'agonie de ce jeune guerrier. Sternitur et dulces moriens reminiscitur Argos. A votre simple trait, ce vers touchant était déjà sur mes lèvres.
TOPFFER

DULCIA LINQUIMUS ARVA
Nous abandonnons nos chères campagnes (VIRGILE, Égl. I, vers. 3).
Après la bataille de Philippes, Auguste avait donné pour récompense à ses soldats les biens de ceux qui avaient embrassé le parti contraire. Le petit domaine du père de Virgile fut enveloppé dans ce partage, mais le jeune poète fut rétabli dans son modeste domaine. La première églogue est un chant de reconnaissance et un remerciement à l'empereur. Mélibée, chassé de son patrimoine, raconte ses malheurs à Tityre, personnage allégorique qui n'est autre que le père de Virgile : « Assis à l'abri de ce hêtre touffu, tu essayes sur ton chalumeau des accords champêtres ; nous, nous abandonnons les champs paternels et nos douces campagnes. » Nos patriae et dulcia linquimus arva !
Il me semble que vous m'avez écrit que quelquefois la malheureuse nécessité de plaider vous arrachait au plaisir et à l'étude ; c'est le cas où est madame du Châtelet. Nos patriae fines et dulcia linquimus arva, nos patriam fugimus. Et pourquoi ? Pour plaider six ou sept ans en Brabant.
VOLTAIRE
Lettre à M. de Cideville
Tandis que M. de la Popelinière louait les grenouilles de la Meuse, M. d'Avaray se pencha vers Nestor de Saint-André : « Ah çà ! mon gentilhomme, lui dit-il, je suppose que vous non plus vous ne ferez pas un long séjour en Angleterre. Nous avons assez pleuré sur les fleuves de Babylone, nous avons quitté depuis assez longtemps nos champs paternels, dulcia arva, comme dirait notre roi Louis XVIII, il est temps de reprendre en France la place qui nous est due. »
Marie AYCARD
J'ai oublié de vous dire que je pars dans huit jours pour retourner en France. Hélas ! oui, dulcia arva ! Et vous, fortuné Tityre, vous restez dans cette belle, cette admirable Italie. Que j'envie votre sort !
DELÉCLUZE
Plusieurs protestants étaient à table, les uns se plaignaient amèrement, d'autres frémissaient de colère, d'autres disaient en pleurant : Nos dulcia linquimus arva, nos patriam fugimus. L'Ingénu, qui ne savait pas le latin, se fit expliquer ces paroles qui signifiaient : Nous abandonnons nos douces campagnes, nous fuyons notre patrie.
VOLTAIRE
L'Ingénu

DUM VITANT STULTI VITIA IN CONTRARIA CURRUNT
Pour fuir un défaut, les maladroits tombent dans le défaut contraire (HORACE, liv. I, sat. II, vers 24).
Boileau a dit : Souvent la peur d'un mal nous conduit dans un pire. Horace, pour compléter sa pensée ajoute le vers suivant, devenu proverbe : Pastillos Rufilius clet, Gorgonius hircum (Rufilius sent l'ambre, Gorgonius le bouc). La même pensée se retrouve dans ce vers devenu proverbe : Incidit in Scyllam cupiens vitare Charybdim (Pour éviter Charybde, il tombe dans Scylla).

En vertu de l'axiome : on ne prête qu'aux riches, on a souvent atttribué ce vers à Horace ou à Virgile ; restituons-le à son véritable auteur, Gauthier, de Lille, surnommée de Châtillon, qui vivait au quinzième siècle. Il a composé un poème en dix chants, intitulé l'Alexandréide. Le vers dont il s'agit est le 301e du cinquième livre, où le poète s'adresse à Danius qui, fuyant Alexandre, tomba entre les mains de Bessus.
Quo tendis inertem
Rex periture, fugam ? Nescis heu ! perdite, nescis
Quem fugas ; hostes incurris dum fugis hostem,
Incidis in Scyllam cupiens vitare Charybdim.

« Roi, qui dois périr, où cours-tu dans ta fuite inutile ? Hélas, malheureux, tu ne sais qui tu dois fuir. Pour échapper à un ennemi tu te précipites sous les coups d'un ennemi, pour éviter Charybde tu tombes dans Scylla. »

Dans La Vieille et les deux Servantes, La Fontaine a dit :
La vieille, au lieu du coq, les fit tomber par là,
De Charybde en Scylla
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DURA LEX, SED LEX
Loi dure, mais c'est la loi.
Maxime absolue, qui doit toutefois s'arrêter dans la limite de cet autre adage : Summus jus, summa injuria (Trop grande justice est injustice).
Pourquoi M. le marquis de M... demande-t-il qu'on lui concède la sacristie ? C'est afin d'y placer un banc d'honneur pour lui, ses rejetons et leur descendance, un banc d'où ces nobles personnages pourront entendre l'office divin sans être mêlés au commun des fidèles. Or cette prétention, si légitime qu'elle paraisse, est formellement contraire au voeu de la loi : Dura lex, sed lex.
Louis JOURDAN
Je ne demande que justice, puisque c'est au nom de la justice qu'on revendique pour la femme l'égalité. Il restera toujours, en accordant à celle-ci toutes les conditions d'éducation, de développement et d'initiative possibles, qu'en somme la prépondérance est acquise au sexe fort dans la proportion de trois contre deux, ce qui veut dire que l'homme sera le maître et que la femme obéira : Dura lex, sed lex.
PROUDHON

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